Est-ce le bon moment ? C’est la question que se posent des millions de Français alors que le marché de l’immobilier traverse une forte période de turbulences. Thomas Lefebvre, directeur scientifique du Groupe SeLoger, décrypte pour nous les signaux d'une reprise en douceur très attendue.
Commençons par faire le point sur la situation de l'immobilier en 2024. Que pouvez-vous nous en dire ?
Nous observons des signes encourageants d'amélioration du marché immobilier en 2024. Après un début d'année difficile, nous constatons que le pire est derrière nous. Certes, pour l’année 2024, le volume de transactions restera en dessous de l’année 2023 ( - 11 %), mais la baisse des prix ralentit nettement. Sur les 12 derniers mois, les prix n'ont reculé que de 1,3 %, ce qui est pour nous un bon signe de sortie de crise.
La tension locative reste forte. L’offre de logements se stabilise à un niveau bas : la demande locative reste tendue et l’évolution des loyers continue de progresser ( + 4 % en un an) ce qui pourrait à terme contribuer à équilibrer le marché.
Quels sont les signaux et comment SeLoger et MeilleurAgents veillent sur le marché immobilier français ?
Selon nous, trois indicateurs clés permettent d’avoir une vision précise et éclairée de la situation : le pouvoir d’achat immobilier, la demande et l’offre.
- Le pouvoir d’achat immobilier mesure le nombre de mètres carrés qu’un ménage peut acquérir en fonction de sa capacité à rembourser un prêt immobilier. Cet indicateur prend en compte trois variables principales : l’évolution du taux d’intérêt, des revenus des ménages et des prix de l’immobilier. Pour rendre ce chiffre concret, nous avons constaté qu'entre décembre 2023 et septembre 2024, le pouvoir d'achat immobilier a augmenté de 4 m², ce qui est un signe positif pour les acheteurs.
- Deuxièmement, nous avons développé un indicateur inédit pour suivre l'évolution de la demande. Grâce aux 6 millions de visiteurs mensuels sur SeLoger.com, nous pouvons mesurer les demandes de mise en relation avec des professionnels de l'immobilier. Cela nous permet d'identifier le nombre d'acheteurs motivés. Depuis 2021 nous avions enregistré une baisse de 14 % et actuellement une hausse de 3,1 % de la demande. Cela indique un certain regain d'intérêt des acheteurs captifs. Autrement dit, la demande repart enfin !
- Enfin, nous surveillons de près l'offre de biens à vendre. Après avoir atteint son point le plus bas en mai 2022, le nombre de biens disponibles à la vente ne cesse de croître. Cette stabilisation de l'offre est un signe encourageant pour viser l'équilibre du marché entre l’offre et la demande.
Quelles sont vos perspectives pour 2025 ? Peut-on espérer une reprise ?
Premièrement, nous observons un regain partiel du pouvoir d'achat immobilier, stimulé par une hausse des revenus des ménages et une prévision d’inflation aux alentours de 2 % en 2025 et 2026, ce qui est l’objectif de la Banque de France. Cela devrait entraîner une baisse continue des taux directeurs, libérant ainsi l'accès au crédit immobilier. Avec des coûts de financement en baisse, les marges des banques progresseront sur le crédit et elles seront, de nouveau, plus enclines à octroyer des crédits.
La demande devrait également augmenter au printemps 2025 et nous anticipons que le pouvoir d’achat pourrait augmenter de 7 m2. Cependant, il est important de rester vigilant quant à la croissance des revenus des ménages, qui devrait être plus modérée dans les trimestres à venir.
Enfin, l'offre de biens immobiliers se stabilise après trois années consécutives de hausse. Cette stabilisation contribue à un meilleur équilibre entre l'offre et la demande, créant un environnement plus favorable tant pour les acheteurs que pour les vendeurs.
Quels conseils donneriez-vous à ceux qui envisagent d'acheter ou de vendre un bien immobilier ?
Pour celles et ceux qui ont de bonnes conditions de solvabilité, c'est peut-être un bon moment pour construire un projet. Les prix de l’immobilier s’améliorent dans 63 % des villes et les taux d'intérêt devraient continuer à baisser, quitte à renégocier son crédit dans 24 mois si les taux continuent de baisser sensiblement.
Pour ceux qui cherchent un bien immobilier, mon conseil est de ne pas se décourager. Il ne faut pas hésiter à négocier avec poigne : certains vendeurs restent accrochés à des valeurs de biens de 2022 et le marché continue de se corriger.
Ensuite actuellement, les plus belles opportunités comprennent un projet de rénovation énergétique. Au 1er janvier 2025, tous les logements classés G par leur Diagnostic de Performance Énergétique (DPE) seront interdits à la location et la transformation d’une “passoire thermique” en un logement plus performant sur le plan énergétique augmentera significativement la valeur du bien sur le marché. Nous retenons une décote de 15 % sur les biens au DPE insuffisant (SeLoger un outil pour mesurer l’impact du DPE). De nombreux dispositifs d’aide sont désormais en place : MaPrimeRenov’ (une aide financière de l’État pour la rénovation), les prêts à Taux Zéro (un prêt immobilier sans frais de dossier et dont les intérêts sont à la charge de l'État) ou encore une réduction de l’assurance emprunteur (une protection financière en cas de situation critique affectant la capacité de l'emprunteur à rembourser).
En réalisant ingénieusement vous-même certains travaux, vous pouvez réduire les coûts tout en augmentant la plus-value potentielle. Vous améliorerez non seulement votre confort de vie et réduirez les factures énergétiques. Vous rendrez également votre bien plus attractif pour de futurs acheteurs ou locataires.
Thomas Lefebvre est directeur scientifique du Groupe SeLoger.
Avec son équipe, il développe les modèles prédictifs, des outils d’évaluation et supervise la recherche économique. Vous pouvez retrouver leurs études sur SeLoger et MeilleursAgents.